La minute juridique : les fichiers « perso » au bureau

Comme le sait tout salarié, le temps de travail doit, de toute évidence, être consacré au travail.
Néanmoins, il est admis que le salarié puisse faire des pauses dans son travail et effectuer des tâches qui relèvent de sa vie privée, telles que passer un coup de fil ou échanger des mails avec qui bon lui semble, sans que cela ne puisse, en principe, être contrôlé par l’employeur.

La Cour de Cassation rappelle en effet régulièrement que « le salarié a droit, même au temps et au lieu du travail, au respect de l’intimité de sa vie privée ». Mais comment déterminer ce qui relève de la vie privée de ce qui relève de la vie professionnelle ? La réponse a été énoncée par la Cour de cassation dès 2006 : tout est professionnel, sauf ce qui est identifié comme personnel. S’il ne peut consulter les documents et fichiers estampillés « personnel », l’employeur peut en revanche avoir librement accès à tous les autres documents, même en l’absence du salarié. La jurisprudence a plutôt eu tendance, jusqu’à présent, à renforcer la présomption du caractère professionnel des documents et fichiers accessibles sur le lieu de travail, limitant la sphère privée du salarié. Ainsi, les initiales du prénom du salarié sont jugées comme insuffisantes pour identifier des documents comme étant personnels. Les mails émis par le salarié sont également concernés et peuvent donc être consultés par l’employeur en l’absence du salarié, dès lors qu’ils ne sont pas identifiés comme « personnels ».

A toutefois été jugé que de tels fichiers s’ils s’avèrent finalement relever de la vie privée du salarié, ne peuvent être utilisés pour le sanctionner. C’est le cas par exemple de messages à caractère érotique échangés entre deux salariés au moyen de leur messagerie professionnelle, étant précisé que lesdits messages ne comportaient aucun objet ni référence. N’étant pas estampillés comme « personnel », l’employeur pouvait donc effectivement en prendre connaissance. Toutefois, la Cour ne se limite pas à l’identification des fichiers, elle en examine le contenu et tient compte du fait qu’ils appartenaient à la sphère privée du salarié, peu important qu’ils aient comporté le terme « personnel » ou non.

Julie Moreau
Julie Moreau
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